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Thierry, doyen des trisomiques français, vit heureux à Duras en Lot-et-Garonne

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A 75 ans, Thierry est devenu la mascotte de l'EHPAD de Duras, et il est de toutes les fêtes.

A 75 ans, Thierry est devenu la mascotte de l’EHPAD de Duras, et il est de toutes les fêtes. (©Le Républicain/Dany Blanc)

Sa petite silhouette déambule dans les couloirs de cet EHPAD privé (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) qui porte bien son nom, sur les hauteurs du Lot-et-Garonne, Bellevue.

Les mains dans les poches du pantalon, Thierry observe le visiteur qui vient d’arriver.

Et quand il est assis dans le salon de l’entrée, il salue (ou pas) selon son humeur le personnel de soin dévoué à ses services.

Laurence, à l’accueil, par contre, est sa valeur refuge, celle qu’il consulte quand il a le cœur gros, pour tout, pour rien, et à qui éventuellement, il demande de changer son menu du soir si ce dernier ne lui plaît pas.

Laurence adore Thierry et Thierry adore Laurence. 

Thierry, trisomique âgé de 75 ans, vit ici, à Duras, depuis 2016.

Et en deux ans, il est devenu la mascotte de l’établissement tant il se montre attachant par ses facultés d’adaptation. 

Une autre époque

Thierry est né au retour de captivité de son papa. A l’époque, la trisomie 21 n’est pas encore connue.

Il est le cadet d’une fratrie de trois enfants dont Nicole, la sœur aînée, qui s’en occupe aujourd’hui.

Il mène une enfance bourgeoise, choyée et heureuse. Il va à l’école, puis à l’IME (Institut Médico Educatif) du centre Hoffer à Paris où il apprend à lire et à écrire.

Thierry a 12 ans quand le professeur Jérôme Lejeune découvre la trisomie 21 et le reçoit en consultation.

La Fondation Jérôme Lejeune est désormais le premier centre européen de soins et de recherches médicales sur la trisomie 21. Il propose à ses patients une prise en charge personnalisée tout au long de leur vie. Du pédiatre au gériatre, un seul et même dossier médical, enrichi et complété est transmis.

Le virage de la maturité

L’enfant grandit. L’adolescent acquiert une autonomie qui lui permet de se déplacer seul dans Paris, en métro, en bus.

Habitant chez ses parents à Neuilly-sur-Seine, il intègre dans cette ville un premier CAT (Centre d’aide par le travail). Il est très heureux de travailler au conditionnement de parfums Chanel et Azzaro, mais aussi de pièces de 2CV et même de chocolats Banania !

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Sa mère n’ayant pas eu peur de l’aimer, de l’adopter chaque matin quand il s’agit de commencer une journée qui sera peut-être fort agitée, va s’adjoindre les soins d’une nurse de 25 ans « Mademoiselle », une personne d’un dévouement extraordinaire, qui va adorer Thierry durant 60 ans, en lui consacrant sa vie.

Mademoiselle était si gentille avec moi »

« Mademoiselle»  prendra même un appartement à Neuilly avec lui où il vécu heureux, disant d’elle: 

Grâce à elle, Thierry développe ses talents, dessin, peinture, musique. Il fut un nageur endurant qui participa même à des jeux Olympiques spéciaux.

Soutien familial

Thierry cesse ses activités de conditionnement au CAT pour rejoindre un centre d’initiation au travail et aux loisirs géré par une APEI (associations de parents et amis de personnes handicapés mentales) créée par sa famille en 1964.

Sa mère fut en effet très active dans le développement de nombreux établissements (IME, ESAT.) et dans la reconnaissance sociale et l’attribution de l’Etat d’un statut aux personnes handicapées.

A la mort de sa maman, Thierry fit preuve d’une belle capacité d’adaptation en quittant le domicile familial pour vivre en foyer de vie, toujours à Neuilly, où il restera six ans.

Nicole, sa sœur aimante, nous raconte sa stupéfaction lorsque le foyer lui apprend qu’il ne peut plus garder Thierry! Elle venait de traverser un deuil intime, et doit alors faire face à de nouveaux questionnements vis-à-vis de ce frère.

Alors, à tout hasard, elle téléphone à la résidence Bellevue de Duras, près de son domicile, dirigée à ce moment-là par Florence Merlet, pour demander si Thierry ne pouvait pas être accueilli dans la structure.

Et à son grand soulagement, Florence Merlet lui répond : « Pourquoi pas ? » (Rappelons que la loi handicap de 2005 prône l’inclusion dans la vie ordinaire).

Thierry nous attendait patiemment, à l'accueil de la résidence.

Thierry nous attendait patiemment, à l’accueil de la résidence. (©Le Républicain/Dany Blanc)

Il a su conquérir le cœur de tout le monde

Thierry intègre en 2016 l’EHPAD Bellevue de Duras. Au départ, raconte Nicole, « il n’a pas été accepté par tout le monde ».

La différence peut-être ? Mais très vite, ce petit bonhomme a su s’adapter, et conquérir le « cœur » des soignants et des résidents.

Sensible à la douleur d’autrui, il reconnaît très vite si un résident (e) de son choix n’est pas bien, ou s’il n’a pas le moral. Il va lui prodiguer des paroles rassurantes, dites à sa manière et même faire un « bisou » sur le front.

Albert, son grand ami

Il accompagne certaines personnes en poussant le fauteuil roulant jusqu’au restaurant pour le dîner du soir. Il s’inquiète et demande des nouvelles des résidents alités qu’il a côtoyés.

Thierry s’est lié d’une très forte amitié avec Albert, un trisomique de 67 ans, malheureusement prisonnier dans un fauteuil coque. Thierry lui parlait doucement, le rassurait, lui redonnait sa peluche tombée à terre, et terminait toujours par un bisou sur le front.

Hélas, Albert s’en est allé, Thierry a été très triste, et parle de lui tous les jours. Alors, la famille d’Albert a offert à Thierry une peluche souvenir.

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Elu au conseil de vie sociale de l’EHPAD

Les jours de fêtes, Noël, anniversaires, dans la grande salle de Bellevue, Thierry prend le micro de l’animateur pour signaler à tout le monde qu’il est heureux et qu’il les aime

! Il a même été élu au conseil de la vie sociale de l’établissement. Ce fut une grande joie pour lui, une reconnaissance de son intégration réussie.

Dans la solitude et la monotonie des jours d’une maison de retraite, le rayon de soleil qu’apporte l’attachant Thierry est bienfaisant. Il réchauffe le cœur et vous émeut. Il suffit de l’aimer… et de se laisser aimer par Thierry.

Dany Blanc


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